Développer la citoyenneté : une approche collective

Dans une récente carte blanche publiée dans le Soir de ce mardi, Monsieur Valmy Féaux fait l’un ou l’autre constat et quelques propositions sur le rôle que des associations - dont principalement les organisations de jeunesse - peuvent jouer aujourd’hui dans notre société encline aux actes d’intolérances. Il propose aussi de développer des actions citoyennes qui, en un week-end, permettraient aux jeunes de décrocher un certificat citoyen. Comme organisation de jeunesse, nous ne pouvions rester indifférents à cet appel du pied.

Est-il nécessaire de rappeler ici que cet été encore plusieurs centaines de milliers de jeunes ont participé à des animations encadrés bénévolement par d’autres jeunes ? Est-il utile de dire que durant l’année, ces mêmes jeunes et d’autres se retrouvent autour de projet qui ont pour point commun de les rendre acteurs dans la société ?
Et bien oui, il est sans doute nécessaire de le répéter alors que la plupart de ces activités passent un peu dans l’ombre. Aujourd’hui, l’action citoyenne ponctuelle qui correspond aux prescrit des médias (et donc - peut-être surtout - à ceux des auditeurs de tous poils) avec un bon visuel, un bon fait divers à sa base connaît un plus grand succès d’estime. « Avez-vous vu ces jeunes qui ont été donné de la soupe aux sans abris ? ». La percée des représentations non-citoyennes des jeunes, ces fameux faits qualifiés d’infractions, est bien plus présente à l’esprit de chacun malgré le nombre absolument ridicule de cas recensé. Mais, ce qui est préoccupant, c’est qu’ils augmentent me direz-vous. Bien sûr, comme c’est important de donner de la soupe à ceux qui en ont besoin. Là n’est pas la question.

La reconnaissance de l’action citoyenne des organisations de jeunesse n’est plus à faire. Déjà en 1980, le législateur à reconnu cette spécificité à ces mouvements associatifs de jeunes en leur donnant une reconnaissance décrétale.

Les lois, ou décrets, ont une fonction d’affichage. Les textes votés donnent l’image de la société que le politique veut promouvoir. A ce titre, voter un texte comme celui des organisations de jeunesse est bien conforme aux souhaits exprimés par Monsieur Féaux. D’un autre côté, la valeur qu’on ces textes en définitives est traduite par l’application qui en est faites. Un bon indice est la priorité budgétaire qui leur est accordée. Et là, on est loin du compte.

Le décret des organisations de jeunesse, qui va sans doute être réformé sous cette législature, prévoyait un financement important pour les actions des jeunes, il prévoyait aussi notamment trois permanents par organisation.
Las, quelques crises budgétaires plus loin, il faut reconnaître que les OJ n’ont jamais reçu ce que le législateur avait prévu. Un seul permanent est subsidié (pour parfois plusieurs dizaines pour une organisation d’éducation permanente adulte) et les subsides couvrent entre 70%, pour les plus petites, et 40%, pour les plus importantes, des dépenses des organisations. Pour le solde, nous nous débrouillons. Les formations, un peu revalorisées l’an dernier, ne sont aujourd’hui encore que subsidiées à du 20%.
Pensez-vous que la réforme qu’on nous annonce depuis bientôt quatre ans va nous donner plus de moyens ?
Au contraire, il est certain que nous serons toujours en deçà du décret de 1980, même si le discours du politique sera d’annoncer haut et fort notre refinancement.

Pourtant, dans le même temps, les politiques sécuritaires n’ont pas manqué de moyens, même dans la province dont Monsieur Féaux était gouverneur ; ce qui ne l’avait jamais ému. Non, nous ne nous résoudrons pas à être aussi naïf que Monsieur Féaux prétend l’être.

Depuis 1996, le politique, même retraité, souhaite se refaire une virginité citoyenne : il veut briser son image de gestionnaire distant ne pensant qu’à son pouvoir et sa carrière, pour être à l’écoute des gens. Il s’émeut de l’injustice et des dérives de violence, parfois racistes, qui défraient la chronique. Il exhorte les citoyens à s’intéresser à la politique, aux associations, aux sports. Ils nous mettent en garde de ne pas nous laisser séduire par les discours simplificateurs de l’extrême droite.
En gros, la responsabilité principale du recul citoyen ne les concernes que de loin, à un second niveau. Eux, dans le même temps, peuvent continuer à semer le flou en se présentant à toutes les élections possibles et imaginables, en faisant après coup siéger leur suppléants ; ils peuvent profiter de la place qui leur est offerte dans les médias pour asséner des contres vérités ou brandir des épouvantails, comme lier indéfiniment problèmes (ici de citoyenneté) et jeunesse.
Il y a 25 ans, alors que la famille et l’école se portaient bien, ou mieux, il y avait eu un accord pour subsidier des associations que l’on estimait importante dans le paysage de l’éducation. Aujourd’hui, plutôt que de soutenir l’action au quotidien de ces centaines de milliers de jeunes, on préfère proposer des actions ponctuelles ne remplissant que des effets d’affichage ne s’attachant pas à changer profondément les choses. La citoyenneté touche à tous les aspects de la vie en société et l’ensemble des acteurs de celle-ci. Limiter un discours à une partie de la population, les jeunes en particulier, détourne l’attention. C’est un verni de citoyenneté, ce n’est pas la citoyenneté.

Nous sommes d’accord avec Monsieur Féaux, il faut une impulsion, mais celle-ci doit être de nature citoyenne : associer des représentants des différentes composantes de la société autour d’un projet commun.
Dans quelques mois, les organisations du CJC prendrons l’initiative d’une telle démarche en associant des organisations reconnues ou non, jeunes ou non autour d’une action qui touchera l’ensemble de la société.

D’ici là, des centaines de milliers de jeunes vont continuer, à leur niveau à développer des actions concrètes agissant en vrais CRACS : citoyens, responsables, actifs, critiques et solidaires.

Vincent Gengler
Secrétaire Général f.f. du CJC